Ayacucho en images
INTRO
A l'écart des grands circuits classiques du Nord ou du Sud, une escapade vers Ayacucho (8 h en omnibus par la nouvelle route Los Libertadores, dont le point culminant est le col d'Apacheta à 4750 m) permet de découvrir les paysages magnifiques de la Cordillère Centrale, ainsi qu'une des plus belles et plus attachantes villes du Pérou, véritable joyau d'art colonial, avec ses églises et couvents.
Un artisanat et des manifestations folkloriques remarquables, la proximité de sites archéologiques importants mais aussi la ferveur et le spectacle impressionnant des festivités de la Semaine Sainte - fameuses dans tout le pays - auraient dû faire d'Ayacucho l'un des principaux pôles touristiques du Pérou. Mais son isolement et surtout les terribles années 1980-1990 où elle était le fief de la guérilla du Sentier Lumineux, ont dépeuplé ses campagnes, provoquant un exode rural très massif, et infligé à cette région longtemps déshéritée des épreuves et des souffrances dont elle se remet peu à peu aujourd'hui.
Panorama Ayacucho
Centre ville, Ayacucho
Parmi les ressources touristiques d'Ayacucho, les "Casonas" maisons anciennes de type colonial sont de grande valeur architecturale. Dans ces quartiers se trouvent les ateliers et les maisons des maîtres les plus éminents de l'art populaire, qui expriment leur créativité à travers des sculptures de pierre de Huamanga, des tissus, des retables, la ferblanterie, la pelleterie et la sellerie, entre autres.
Ayacucho, c'est aussi une des villes les plus belles et agréables du Pérou. Un centre de culture vivante qui, en plus de la beauté de ses paysages, des circuits de grande attraction et de sa richesse historique, compte une tradition de culture populaire et religieuse très riche exprimée par ses nombreuses festivités, artisanat, musique, danses, gastronomie et architecture.
Place d'armes Ayacucho
Très agréable, elle est entourée d'arcades et ornée en son centre par la statue équestre du libertador José Antonio Sucre, monument commémoratif de la bataille d'Ayacucho. Autour se dressent la Cathédrale à la façade de style baroque assez sobre qui renferme de magnifiques retables, dont celui du maître-autel, entièrement décoré à la feuille d'or, et l'ancien bâtiment de l'Université San Cristobal de Huamanga, fondée en 1677.
Le 9 décembre 1824, la bataille d'Ayacucho a eu lieu à la pampa de la Quinua. Elle opposa 9.000 hommes du dernier vice-roi José Laserna, aux 5.750 hommes de Simon Bolivar et de José de San Martín, conduites par le général Antonio José de Sucre. La bataille n'a duré que deux heures. Les troupes du vice-roi subissent 1800 morts et blessés, alors que celles de Sucre 310 morts et 609 blessés. Ces dernières font plus de 2000 prisonniers, y compris le vice-roi et son état major avec un butin important. L'indépendance, déclarée par José de San Martin, assure définitivement l'indépendance des colonies espagnoles d'Amérique du Sud.
Le marché, les couleurs, les sourires…
En suivant la populeuse rue 28 de Julio, on découvre à droite l'église de la Compañia érigée par les Jésuites, qui présente une belle façade de pierre rose, entourée de deux puissantes tours. Après avoir franchi un arc monumental de l'époque républicaine, on parvient au Marché - toujours animé et très pittoresque - dans lequel on verra quelques stands d'artisanat, mais surtout l'extraordinaire spectacle des marchandes de fromages, vieilles indiennes en costume et chapeau, posant à côté de leurs pyramides de fromages d'un blanc crémeux (avec ceux de Cajamarca, les fromages au lait de vache d'Ayacucho sont parmi les plus réputés du Pérou).
Plus de 50 % de la population d'Ayacucho se dédie à l'agriculture et 70 % d'entre eux se trouvent en situations de pauvreté ou extrême pauvreté. Les divers étages écologiques d'Ayacucho permettent de nombreux avantages pour la culture de fruits comme la grenade, l'avocat ou la figue de barbarie d'une grande qualité à plusieurs niveaux (arômes, saveurs, couleurs…). Un climat exceptionnel, l'accès à l'eau (41 % de la superficie cultivable se trouve irriguée) et enfin la récente route asphaltée qui communique avec la côte permet le développement des échanges commerciaux.
Vendeuse de feuille de Coca
Les feuilles de coca sont consommées traditionnellement dans les Andes depuis la nuit des temps, probablement depuis au moins 5 000 ans. Les légendes incas attribuent l'origine de la coca au dieu Inti qui l'aurait créée pour apaiser la soif et la faim des Incas. Chez ces derniers la Mama coca, qui serait la fille de Pachmama était une plante divine et la feuille était le symbole de la divinité réservé aux personnes de très haut rang. L'ONU a demandé en mars 2008 aux gouvernements péruvien et bolivien d'interdire la production de coca, que ce soit pour l'usage traditionnel ou non...
Propriété de la feuille de Coca :
- La papaïne, ferment qui aide à la digestion en l'accélérant, propriétés cicatrisantes pour la peau,
- La higrine qui a des vertus sur la circulation sanguine, et protège du mal des montagnes,
- La quinoline qui évite la formation de caries dentaires lorsqu'elle est mélangée avec du calcium et du phosphore,
- L'atropine qui possède un effet déshydratant au niveau des voies respiratoires,
- La benzoine qui a un effet cicatrisant sur la peau, propriétés antifermentation,
- La pectine qui est un absorbant au niveau intestinal, est aussi efficace comme antidiarrhée,
- La globuline qui est une protéine cardiotonique, qui optimise le travail du cœur, évitant la tachycardie et l'hypotension, qui constituent la réponse physiologique immédiate à une haute altitude supérieure à 3 000 m, c'est aussi un remède efficace et indispensable pour le traitement de la maladie des hautes altitudes (également appelé le mal aigu des montagnes),
- La piridine qui stimule la circulation sanguine, facilitant l'oxygénation - particulièrement du cerveau - réduit par l'écoulement plus lent du sang, à cause de la polyglobulie, qui est la réponse physiologique immédiate aux hautes altitudes,
- La réserpine qui réduit la haute pression sanguine,
- La cocamine qui possède des effets anesthésiques,
- La coniine qui est un anesthésique local puissant,
- La cocaïne qui représente 80 % des alcaloïdes de la feuille de coca, c'est un anesthésique local qui agit sur les tissus externes et internes qui sont blessés,
- L'ecgonine qui agit au niveau du métabolisme des glucides, générant de l'énergie, il est un complément aux diètes.
- L'inuline rafraîchit et améliore le fonctionnement du foie, la sécrétion de la bile et son accumulation dans la vésicule ; diurétique, aide à l'élimination des substances novices et toxiques non physiologiques. C'est un polysaccharide qui produit une augmentation des cellules sanguines.
Cathédrale, Ayacucho
La ville est entourée de figuiers de barbarie (Tuna). Elle a un climat très agréable et est aisément parcourable à pied sauf l'effet de l'altitude ! On y trouve aussi des vestiges de cultures très anciennes comme la culture Wari. La ville est célèbre pour ses fêtes religieuses et elle est connue comme la ville des 37 églises (officiellement 33, en référence à l'âge du Christ).
De ces terres a surgi, entre le VIe et le XIIe siècle, la culture Wari. Ayacucho fut la capitale du dernier empire pré incasique. Les Waris avaient un style de construction qui leur était propre. Leurs cités étaient d'abord établies sur plan, puis maquettées avant d'être réalisées. Les maisons avaient plusieurs étages, et dans nombre d'entre elles, les murs de pierre étaient couverts de stuc et peints. Les Huaris furent de grands céramistes avec une production très importante dont on retrouve encore partout de nombreux objets historiques. Leurs champs étaient desservis par de longs canaux d'irrigation. La cité de Vilcashuaman fut un centre important et une capitale régionale, même à l'époque Inca. Ushnu est une pyramide en escalier tout à fait remarquable, construite en blocs volumineux parfaitement ajustés. C'était un lieu de culte important.
Fête traditionnelle
Entre rose et épine Ayacucho aura suscite une grande admiration. A la fois poètes et guerriers, les populations nous accueil les bras grand ouvert .
Place d'armes pendant la semaine Sainte
Ayacucho célèbre avec éclat la semaine sainte, où s'allient ferveur chrétienne et tradition indigène. La plus grande fête de Huamanga, connue dans tout le pays, est restée discrète pendant plusieurs années: on craignait les attentats ou les embuscades; le couvre-feu interdisait les processions nocturnes. Cette fête n'a retrouvé sa splendeur qu'en 1993, après l'arrestation du chef du Sentier lumineux, Abimaël Guzmán, le 12 septembre 1992.
Manifestation pour réclamer la vérité sur les disparitions
Professeur de philosophie à l'université d'Ayacucho, Abimaël Guzmán, fondateur du Sentier Lumineux (dissidence du parti communiste péruvien), avait lancé sa «guerre populaire prolongée» par un acte symbolique en mai 1980: à deux jours des élections, un commando avait brûlé les urnes de Chuschi, village isolé du département. Il a fallu attendre la fin des années 80 pour que le conflit armé devienne le thème central dans la presse nationale ; il y avait pourtant déjà bien longtemps que la destruction et la douleur s'étaient installées dans les recoins et les localités ignorées des Andes centrales et du Sud. Aujourd'hui de nombreuses personnes attendent encore des réponses pour retrouver les corps des disparus.
Enfants d'Ayacucho dans les années 1980-1990.
Le département d'Ayacucho a été, de loin, le plus frappé de tout le Pérou par le terrorisme sentier lumineux et les exactions des escadrons spéciaux de l'armée. Le bilan pour la province s'écrit tragiquement: plus de 10 000 paysans assassinés, 3 000 disparus, 50 000 orphelins et 170 000 personnes déplacées. 35% de la population de la ville en a été directement et personnellement touchée et meurtrie.
Le Sentier lumineux (Sendero Luminoso) était groupe révolutionnaire péruvien fondé en 1970, dont le but était d'instaurer au Pérou un régime marxiste d'inspiration maoïste.
Cette organisation tire son nom d'une déclaration du révolutionnaire péruvien, José Mariategui : « Le marxisme-léninisme ouvrira le sentier lumineux vers la révolution » (« Marxismo-Leninismo abrirá el sendero luminoso hacia la revolución »). Le Sentier lumineux s'est toujours montré fidèle à sa politique extrémiste, se réclamant exclusivement des doctrines communistes de Staline et de Mao Zedong (Mao Tsé-toung), maîtres à penser trahis selon eux par les régimes qui leur ont succédé.
Son leader, Abimaël Guzman, met au point une structure complexe et remarquablement organisée permettant au Sentier lumineux d'agir en toute impunité. Basée dans les Andes péruviennes, où elle recrute ses premiers membres parmi les paysans pauvres, l'organisation étend progressivement ses activités depuis ses bases, dans les montagnes, vers les principales villes du Pérou jusqu'à couvrir l'ensemble du pays.
La longévité et le succès du Sentier lumineux sont dus à un certain nombre de facteurs, dont l'image charismatique d'Abimaël Guzman. Le groupe, qui a toujours su rallier à sa cause de nouvelles recrues, a éliminé sans pitié les habitants des zones rurales dissidentes et a su tirer parti de la lutte engagée à son encontre par l'armée. En proie à des luttes internes à compter de l'arrestation d'Abimaël Guzman, en 1992, l'organisation devient beaucoup moins active et elle est voie d'extinction au milieu des années 2000, même si quelques groupes continuent de sévir.
Angélica Mendoza de Ascarza (Lauréate prix Nobel de la paix 2003)
Cette femme est un exemple impressionnant de ce dont sont capables des citoyens ordinaires lors de circonstances extraordinaires. Depuis l'enlèvement et la disparition en 1983 de son fils de 19 ans, Arquimedes, Mme Mendoza de Ascarza a travaillé sans relâche afin de découvrir son sort ainsi que celui de milliers d'autres victimes de la guerre civile au Pérou. Le travail de Mme Mendoza de Ascarza a été une source d'inspiration menant à la création de la Commission de vérité et réconciliation au Pérou avec son association l'ANFASEP.
En septembre 1982, Edith Lagos était capturée et assassinée par l'armée péruvienne. Cette jeune femme âgée d'à peine 19 ans avait commandé un détachement de l'armée populaire de libération qui se porta à l'attaque de la prison d'État d'Ayucucho où bon nombre de prisonniers politiques était retenus. Selon le journaliste Jonathan Cavanagh du Wall Street Journal, et bien que ses funérailles aient été déclarées illégales par le gouvernement, il y avait plus de 30 000 personnes pour assister à la procession funèbre dans les rues d'Ayacucho, soit la moitié de la population de la ville.
Enfants du Comedor de l'ANFASEP en 1986
L'ANFASEP a été fondée le 3 septembre 1983. Elle rassemble des familles des détenus et disparus. Les buts que l'ANFASEP poursuit sont le retour en vie des personnes disparues et le châtiment des responsables de ces crimes contre l'humanité. En 1984 l'association finance une cantine qui permet de nourrir plus de 470 enfants qui n'ont plus de parents.
Toutes les femmes, au-delà des frontières et des clivages sociaux, culturels, ethniques ou nationaux, ont aujourd'hui un combat essentiel à mener afin que soient respectés leurs droits fondamentaux, trop souvent bafoués. Ce sont les femmes et les enfants qui forment la majorité des victimes de guerre, des réfugiés et des personnes déplacées ainsi que des pauvres de ce monde.
Chapeau typique d'Ayacucho
Berceau de multiples cultures, ville de contrastes, d'églises coloniales, de vieilles ruelles, de matins ensoleillés, d'après-midi ombragés et de nuits de danses Huaino et de bière, Ayacucho se remet lentement de son passé. La récupération exige du temps. Elle requiert aussi la reconstruction de son tissu social. La traditionnelle solidarité au sein des communautés andines y aidera. Cependant, ce vœu ne deviendra vraiment réalité que lorsque la population pourra de nouveau exercer ses droits fondamentaux et que des mesures seront enfin effectivement appliquées pour endiguer la pauvreté et la marginalisation.
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