Juancitucha

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Ces bases étasuniennes qui empoisonnent l’Amérique Latine


http://www.legrandsoir.info/local/cache-vignettes/L250xH167/arton9670-13561.jpgEstelle LEROY-DEBIASI

Le problème des bases étasuniennes- et des intentions des Etats-Unis - dans la région est au cœur de toutes les discussions et réunions. Témoin, le conseiller d’Obama, Arturo Valenzuala, qui a entamé une tournée en Amérique Latine - n’a pas échappé à la question avec ses interlocuteurs au Brésil - qui ne voient pas dans cette présence massive en Colombie un signe positif- ni sans doute en Argentine hier.

Quant au sommet de l’Alba qui a réuni à la Havane, les Venezuela, Bolivie, Cuba, Nicaragua, Honduras, Equateur, République Dominicaine notamment, le communiqué commun fut très clair : ces bases "constituent un danger pour les pays de la région et une menace grave pour la paix, la sécurité et stabilité de l’Amérique Latine et des Caraïbes" (Agence Pulsar , 14 décembre).

Bref, les 7 bases étasuniennes en Colombie sont un sujet d’inquiétude depuis plusieurs mois. On le comprend d’autant plus que selon La "Comisión de Transparencia y Verdad" (commission de transparence et vérité) créée par le gouvernement équatorien, les Etats-Unis ont appuyé l’armée colombienne quand elle attaqué un campement des FARC en Equateur en mars 2008. Et c’est justement à travers la base militaire de Manta - qui se trouve au Sud Ouest de l’Equateur- que cet appui a été apporté. Selon le rapport, « l’intelligence stratégique mise en place depuis la base de Manta fut fondamentale pour suivre et localiser Raul Reyes… » (Selon l’Agence Pulsar, 11 décembre 2009) ; ce qui ne correspondait pas à la finalité de l’accord initial passé avec l’Equateur.

Les militaires étasuniens utilisaient la base de Manta depuis 1999, quand le président équatorien de l’époque a autorisé l’intervention dans cette région dans le cadre d’un soit-disant plan de lutte antidrogue. Dès sa prise de mandat l’actuel président Rafael Correa s’est opposé à cette base, considérant qu’elle violait la souveraineté équatorienne. Et le 18 septembre dernier, le gouvernement équatorien a repris le contrôle de Manta en ne renouvelant pas l’accord passé avec l’armée étasunienne.

Qu’a cela ne tienne. Non seulement dès avril de cette année, les Etats-Unis annonçaient la réactivation de la 4ème flotte (en sommeil depuis 1948) mais surtout quelques mois après ils faisaient part de leur intention de s’implanter dans 7 nouvelles bases en Colombie. Comme le soulignait Ignacio Ramonet, directeur de l’édition espagnole du Monde diplomatique et président de l’Association Mémoire des Luttes, [récemment dans une conférence [1], les Etats-Unis ont modifié leur politique militaire sur l’Amérique Latine, appliquant la doctrine Rumsfeld qui vise à transformer les lourds bataillons en une force très mobile, souple, réactive, avec des armes ultramodernes.

Il ne s’agit plus d’avoir en main leurs propres bases, lourdes en hommes et en matériel, mais plutôt de s’installer sur des sites opérationnels. Les Etats-Unis parasitent en quelque sorte des bases militaires locales, dans une perspective toutefois de long terme les accords portent par exemple en Colombie sur dix ans. Non seulement cela coûte moins (matériel, hommes) mais cette stratégie leur permet une plus grande dispersion. Dans le cadre de cette politique, il s’agit de mettre en place un maillage qui répond à leurs objectifs. Ainsi les Etats-Unis compteraient quelque 750 bases de cette nouvelle forme dans le monde.

A cela s’ajoute que les conflits contemporains sont des conflits asymétriques. Dans cette région le fait que plusieurs Etats ne s’inscrivent pas dans la logique néolibérale est une préoccupation pour les Etats-Unis ; le fait que d’importantes et stratégiques ressources naturelles y résident -eau, hydrocarbure, biodiversité- est un enjeu. La réponse est deux bases au Pérou, quatre au Panama, 7 en Colombie. Dès lors, il suffit de regarder la carte pour comprendre l’encerclement du Venezuela. Sans oublier que leur intention était d’en avoir une au Paraguay pour surveiller la triple frontière argentino-bresilienne et la Bolivie mais le président Lugo a mis son veto.

Pour mémoire enfin, alors que d’aucuns montrent du doigt les dépenses militaires du Venezuela, dans la région c’est le Brésil qui a le plus gros budget militaire suivi de la Colombie -les Etats-Unis à travers le plan Colombie lui versent 750 millions de dollars par an-, devant le Chili. Il serait temps de mettre fin à certaines idées reçues.

Estelle Leroy-Debiasi
http://www.elcorreo.eu.org/article.php3?id_article=4574

Notes :

[1] le 9 décembre 2009 à la Maison de l’Amérique Latine



23/12/2009
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