Juancitucha

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COCA-COCAÏNE



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Cette série d'article pour objectif de mettre en évidence un paradoxe. D'un côté, la cocaïne tue près de 30.000 personnes aux Etats Unis. Ceux-ci pensent avoir trouvé la solution en adoptant une tactique ferme d'éradication des plantations de coca en terre étrangère. D'autre part, des paysans bolivien continuent à se battre pour préserver la culture de cette plante qui fait partie de leur patrimoine culturel et constitue leur gagne-pain. La répression qui est menée et surtout l'absence d'alternatives offertes aux paysans boliviens porte les germes d'une situation qui pourrait devenir difficilement maîtrisable

 

 

 

Quelques dates importantes :

 

Des traces retrouvées en Amérique latine tendent à prouver que la coca, plante sacrée, est présente depuis 3 000 av. JC. De nombreuses cultures ont utilisé cette planter sacrée du sud de Panama jusqu'au nord de l'Argentine et du Chili, en passant par la Bolivie et le Pérou. Les peuples indiens de la Cordillère qui la mastiquent depuis plus de 4000 ans la considèrent comme un don du dieu soleil.

 

 

 Sous l'Empire inca, l'administration développa fortement la culture du cocaïer, la coca devenant un tribut économique et politique. L'organisation économique de l'Empire inca tournait autour de l'échange et de la réciprocité. Chaque région, en fonction de son altitude et de son sol, était chargée de telle ou telle production. L'Etat inca centralisait cette production et organisait la redistribution. Les habitants de la côte produisaient le poisson ; ceux des vallées la coca ; ceux des montagnes, les lamas, et ils échangeaient leurs productions.

 

 

Mais les prophètes prédisaient également que l'homme blanc trouverait le moyen de corrompre leur "plante petite mais forte" : "Si ton oppresseur arrive du nord, le conquérant blanc, le chercheur d'or, dès qu'il la touchera, il ne trouvera que poison pour son corps et folie pour son esprit." Ce qu'ils n'avaient pas prévu, c'est que le retour de bâton serait aussi grave.

 

 

La venue des conquistadores ne fit que renforcer la dynamique de production : l´usage de la plante fut d´abord condamnée par le premier Conseil Eclésiastique de Lima de 1551, étant donné son rôle magico-religieux. Mais, vu le développement de l'exploitation des mines d'argent de Potosi, le roi Philippe II d'Espagne, conscient que la coca permettait un meilleur rendement du travail, la déclara indispensable au "bien-être" des Indiens. C'est seulement grâce à la coca que le peuple andin parvint à supporter l'infernal travail dans les mines, de plus l'impôt sur la production de cette plante alimenta les caisses de la Couronne.

 

 

En 1630 Potosi  nerf du royaume d´Espagne était  aussi la plus grande du monde (elle comptait alors quatre fois plus d´habitants que Paris). La production et la commercialisation du " Talisman du Diable" , aux mains des Espagnols, se substita a l'or comme valeur d´échange.

 

 

 

A l´Indépendance la Bolivie récupéra le contrôle de la production de coca.

 

Au 18e siècle, la région des Yungas (Bolivie) et le versant oriental de la Cordillère (Pérou) devirrent les principales zones de production de la coca. Celle-ci joua alors un rôle très important : elle offrait un revenu en nature pour les ouvriers agricoles, de troc pour les propriétaires, on leva une taxe sur son commerce au bénéfice des  intermédiaires et de l'Etat, on préleva la dîme pour le clergé.

 

 

En 1949, une étude de  Howard Fonda, un banquier nord-américain, affirmant que la mastication de cette plante était "responsable de la déficience mentale et de la pauvreté qui régnaient dans les pays andins", entraîna les premières tentatives d'éradication.

 

 

1953:suite à la réforme agraire les paysans obtinrent des terres sur l'Altiplano, mais pas suffisamment pour nourrir leur famille. Ils commencèrent à migrer spontanément vers la forêt, dans les basses terres du bassin amazonien.

 

 

Peu après, en 1961, les Nations Unies inscrivirent la coca au tableau n° 1 des stupéfiants, en faisant ainsi une des substances les plus dangereuses, à interdire absolument. Cela n'eut bien entendu aucun effet sur la consommation des Etats-Unis où les cadres sniffaient des lignes de cocaïne tandis que les habitants des ghettos optaient pour son parent pauvre et bien plus dangereux, le crack.

 

 

Dans les années 70, pendant la dictature militaire du général Banzer (1971-1978), appuyée par le Département d'Etat américain, le système de production de la drogue fut mis en place à partir des cercles du pouvoir. Les fonds de la Banque agricole de l'époque étaient détournés au profit des grands chefs d'entreprise de l'Est bolivien, avec l'unique objectif de développer le trafic de drogue.

 

 

Les années 80, furent marquées par une explosion de la demande internationale de cocaïne et par de fortes sécheresses sur les hauteurs.

 

 

En 1985 La fermeture des mines d'étain, mit à pied des milliers de mineurs. Cela entraîna une nouvelle vague de migration vers les zones tropicales.

 

 

En 1988, le gouvernement créa deux zones de production de coca : une légale et une autre excédentaire et, finalement, illégale. Les Etats-Unis ont imposé une loi de  contrôles des stupéfiants,  suivie en Bolivie par la loi 1008, permettant de poursuivre les producteurs, de les obliger à arracher la coca. C'est ce que l'on nomme l'option " coca zéro "

 

 

En novembre 2001, des groupes de paramilitaires massacrent des paysans, ceux-ci continuent à être persécutés, sans que l´Etat bolivien n'intervienne.

 

 

Le début février 2002, voit encore des affrontements entre les forces de l'ordre et les « Campesinos »

 

 

En ce début de troisième millénaire, l´"Acullicu" (traduit imparfaitement par le "mâcher" de la coca), est encore au coeur de la vie des populations andines, lors d´actes sociaux ou pour aller travailler. La Bolivie est le pays le plus indien de l'Amérique "latine", on estime que 60 % de la population partagent les valeurs de la culture quechua-aymara, pour laquelle l'usage de la feuille de coca est un élément de la culture traditionnelle.

 

 

 

La coca : une culture

 

En Bolivie et au Pérou, on voit encore aujourd'hui des paysans saluer la montagne avec trois feuilles de coca dans la main avant de travailler. Pour les Indiens, il y a trois mondes : celui d'en haut, (des dieux et des esprits), celui du milieu, où nous vivons,  et celui d'en bas. Entre ces trois mondes, un échange spirituel s'établit. La feuille de coca est toujours présente, sans quoi il n'y a pas d'échange avec les esprits et le rituel n'est pas possible.

 

 

Elément spirituel et religieux, la coca est offerte à la Pacha Mama (Terre Mère) pour la remercier d`une bonne récolte. Lors du "Kintu" (messe andine) les "Yatiris" (prêtre aymaras) lisent l´avenir entres ses fibres. Dans les pays andins, tout décès, mariage ou autre rituel social ou religieux comprend une offrande de coca. "Garde ses feuilles avec amour", ordonne la Légende de la coca, un poème oral vieux de huit cents ans. "Et quand tu sens la peine dans ton coeur, la faim dans ta chair et les ténèbres dans ton esprit, porte-les à ta bouche. Tu trouveras amour pour ta peine, nourriture pour ton corps et lumière pour ton esprit."

 

 

La coca tient aussi une bonne place dans la pharmacopée traditionnelle andine elle sert à guérir des maux comme la dysenterie et le mal des montagnes. Elle est, par exemple, administrée en mate (infusion) en cas de problèmes digestifs, ou en cataplasme pour soigner les fractures.

 

 

Riche en vitamines, calcium, fer et phosphore, elle constitue également un complément alimentaire pour des populations dont le régime est essentiellement composée de tubercules. La grande majorité des Boliviens continuent à en mâcher quotidiennement pour prévenir la sensation de faim car, mélangée à de la cendre, elle a un effet anesthésiant sur l'estomac.

 

 

La coca sert également d'instrument d'échange : les tribus qui cultivent les pommes de terre sur les terres froides de l'Altiplano les échangent contre des feuilles de coca cultivées sur les versants orientaux des basses vallées.

 

 

 

La coca a donc une forte valeur symbolique ; elle est un moyen d'échange, un langage pour entrer en communication avec l'autre monde, là où sont dieux, démons, morts, passions désirs, peurs, et pour se mettre en relation avec ses semblables.

 

Dans le monde occidental marqué par le christianisme, le pain et le vin constituent des symboles très forts. De même, l'alcool social est utilisé pour souhaiter la santé et le bonheur et pour recevoir un ami. Il facilite l'échange. Dans la culture andine, c'est la coca qui remplit ce rôle. C'est une marque de confiance, une carte de présentation, une preuve de bonnes intentions. Si un Indien te considère comme un ami, il doit t'offrir de la coca. La coca est présente dans toutes les activités publiques et privées de la communauté .

 

 

 

Comment manger la Coca

 

Traditionnellement, les feuilles de coca séchées sont chiquées en  mélange avec de la chaux ce qui atténue l'amertume du goût et augmente l'effet stimulant en facilitant la solubilisation de la cocaïne (l'addition de chaux augmente de dix fois la concentration plasmatique en cocaïne chez l'usager). Dans les tribus indiennes des Andes qui en font usage traditionnellement, les hommes reçoivent, lors des rites marquant la puberté, une sorte de gourde contenant de la chaux dont ils ne se sépareront plus. La chaux est prélevée avec un bâtonnet humidifié de salive puis placée dans la bouche avec des feuilles de coca débarrassées au préalable de leur nervure principale. L'opération est répétée jusqu'à former une boule placée entre la joue et la mâchoire. La boule n'est pas mastiquée mais chiquée comme du tabac pendant trois quarts d'heure pour en extraire le jus. 

 

 

 

En général, un coquero (mâcheur de feuilles de coca) prend cinq à six chiques par jour représentant 50 à 100 g de feuilles. L'ecgonine (80 fois moins puissante que la cocaïne qui est la benzoyl-ecgonine) et la cocaïne, en faible quantité, passent dans la circulation en traversant les muqueuses de la bouche, de l'estomac et de l'intestin. La cocaïne y est rapidement détruite. À côté de leur effet stimulant, particulièrement utile pour des montagnards vivant le plus souvent dans des conditions difficiles à haute altitude, les feuilles constituent aussi un complément alimentaire non négligeable en raison de leur richesse en protéines, en sels minéraux (calcium, phosphore) et en vitamines (A et B2).

 

 

 

 

La Coca : une plante miracle

 

A  la différence du maïs ou du riz, principales productions agricoles de l'Amérique du Sud tropicale, la coca est particulièrement bien adaptée aux fortes pentes et aux sols pauvres de la zone du Chapare proche de Cochabamba en Bolivie. De plus, elle offre trois à quatre récoltes par an. C'est une plante très résistante aux parasites et aux maladies, aisément transportable et son marché local est stable.

 

 

La coca contient quelque 14 alcaloïdes (substances organiques basiques d'origine végétale possédant une puissante action physiologique) différents, dont la cocaïne à hauteur de 0,5 à 3 %. En mastiquant la feuille de coca, on extrait un peu de cette cocaïne, celle-ci se retrouve dans le sang, mais à un taux très faible. On peut également extraire la cocaïne par un procédé chimique pour s'en servir dans la fabrication de médicaments ou de drogue. La cocaïne, dans son usage toxicomaniaque, est une drogue stimulante elle s'accompagne du contrecoup de la descente. Avec l'acullicu, on a l'effet stimulant avec un apport non négligeable en vitamines et en aliments concentrés.

 

 

Scientifiquement, c'est un stimulant, pas un narcotique. Elle ne crée pas de dépendance, la coca est différente de la cocaïne, comme le raisin est différent du vin. Les gens qui mastiquent de la coca n'ont pas de caries. Et pour les gens pauvres qui travaillent beaucoup, elle diminue la faim et augmente la résistance physique, tout en alimentant la personne.

 

 

100 grammes de coca bolivienne suffisaient largement à satisfaire les besoins journaliers en calcium, fer, phosphore, vitamines A et B2. Contrairement à la croyance populaire, le coup de fouet que procure cette plante ne vient pas de son 0,5 % de cocaïne - qui est en fait détruit par la salive dans le tube digestif - mais de la transformation de ses hydrates de carbone en glucose et de son effet stimulant sur l'appareil respiratoire.

 

 

La Convention de Genève, considère la feuille de coca comme un stupéfiant, au même titre que la cocaïne, l'héroïne, l'opium, mais un récent rapport de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) démontre que dans son état naturel, elle n'est pas nocive pour la santé. L'université de Harvard affirme même que ce serait un des meilleurs aliments au monde. Pourtant, par intérêt géopolitique, on continue à tenter d'éradiquer cette plante.

 

 

 

La coca : dans l'industrie 

 

On trouve déjà en Bolivie trente produits à base de coca , qui vont du shampoing au dentifrice et passant par différents médicaments,  tout une gamme de pastilles. Pour les défenseurs de la plante, il s'agit là d'un potentiel considérable : on pourrait sauver le gagne-pain de plusieurs milliers de paysans pauvres en la commercialisant à l'Ouest. Or la seule société qui a réussi à contourner l'interdiction, c'est l'américain Stepan, qui - ironie suprême - importe en toute légalité 175 000 kg de coca du Chapare chaque année pour fabriquer, entre autres choses, un arôme décocaïné pour Coca-Cola.

 

 

 

La drogue :

 

Selon un rapport sur les drogues dans le monde, présenté au siège de l'ONU, environ 180 millions de personnes consomment de la drogue dans le monde, soit 3% de la population mondiale, ou encore 4,2% des personnes âgées d'au moins 15 ans. Ils consomment essentiellement du cannabis (144 millions de consommateurs), des stimulants aux amphétamines (20 millions), de la cocaïne (14 millions) et des opiacés (13,5 millions dont neuf millions d'héroïnomanes).

 

 

Il existe principalement trois types de cultures illicites dans le monde : la coca, le pavot, le cannabis. Il faut, par exemple, 10 kg d'opium pour fabriquer 1kg d'héroïne pure et 400 kg de feuilles de coca pour fabriquer 1kg de cocaïne.

 

 

La cocaïne, est une invention européenne. En 1880, le chimiste allemand A. Niemman en extrait le premier un des alcaloïdes, la cocaïne, utilisée comme anesthésiant oculaire et dentaire. Dans les années 80, les Etats-Unis consommaient plus de la moitié de la cocaïne produite dans le monde alors que ses habitants ne représentent que 5 % de la population mondiale. Ils dépenseraient chaque année quelque 50 milliards de dollars pour se la procurer.

 

 

Les raisons qui amènent quelqu'un à se droguer sont globalement les mêmes au Sud et au Nord. Les conséquences également. Les différences portent, sur la qualité des produits (de moins bonne qualité donc plus nocifs au Sud), sur les répercussions sociales, notamment au sein de la famille. Mais la toxicomanie reste un fléau qui touche à la fois au plus profond de l'individu et à l'ensemble de la société ce qui la rend si difficile à appréhender.

 

 

 

Or blanc

 

Les feuilles de coca sont presque exclusivement cultivées dans la Cordillère, au Pérou,  en Bolivie et en Colombie. La Bolivie est, avec son voisin péruvien l´unique endroit au monde où la production et la commercialisation de la feuille de coca sont légales jusqu´à un certain point. Mais plus que partout ailleurs, on produit de la pâte basique ; c'est la première étape de la fabrication de cocaïne. A partir de cette pâte aux cristaux de cocaïne, démarre tout un processus de nettoyage et d'épuration.

 

 

On dénombre environ trois dérivés principaux de la coca. La première transformation chimique donne la Pate Base Cocaïne (PBC) qui, mélangée avec du tabac, est fumée sous le nom de basuco. Des transformations supplémentaires donnent le chlorhydrate de cocaïne, appelé le plus souvent cocaïne ou coke, qui est inhalé (sniff) ou injecté. Enfin, le raffinage du PBC ou de la coke donne des cristaux fumables appelés crack ou free-base. La Bolivie s'est spécialisée dans la production de PBC, plus dangereuse que la cocaïne, car en amont de tout le processus d'épuration.

 

 

Le chlorhydrate de cocaïne est payé 1 000 dollars le kilo en Bolivie par les "importateurs" qui le revendent 3.000 dollars de l'autre côté de la frontière et 5 000 dollars à São Paulo. Ceux qui alimentent le marché local ou international l'achètent à leur tour jusqu'à 20 000 dollars.

 

 

Cet or blanc a pris un poids considérable dans l´économie latino américaine et mondiale. Chiffre d´affaire annuel "estimé" par l´OEA (Organisation des Etats Américains) : 150 à 200 milliards de dollars soit  33 fois le PNB bolivien . Pour finir, 90% de l'argent généré par le trafic de drogue se recycle dans les pays riches. Et Internet, les cybercasinos, etc., ont encore facilité le blanchiment.

 

 

Il semble évident que la lutte contre la drogue - la prévention comme la prohibition - doit prendre en compte la dimension internationale du phénomène.  Il faut relativiser la vision d'un Sud producteur et d'un Nord consommateur, même si ce découpage reste en partie pertinent. Il faut aussi savoir que 5 000 tonnes de marijuana sont produites aux Etats-Unis chaque année

 

 

 

Les cartels :

 

Avec un chiffre d'affaires estimé entre 300 et 500 milliards de dollars, le trafic de drogue est devenu le deuxième marché économique au monde, juste derrière les armes ,mais devant le pétrole. Les bénéfices sont, eux, de l'ordre de 200 milliards de dollars et le blanchiment d'argent sale de 150 milliards. Si les bénéfices et les sommes en jeu paraissent colossales, elles ne se répartissent pas de la même façon entre les différents protagonistes. En effet, alors que les trafiquants tirent un profit maximal du trafic, les paysans tentent seulement de survivre, face à leur propre pauvreté et à celle de l'économie de leur pays.

 

 

C'est en jouissant de l'indifférence voire de la complicité de la classe politique que les narcotrafiquants ont mis sur pied les réseaux qui leur ont permis de devenir les premiers producteurs de cocaïne latino-américains. L'alliance de fait explose lorsque les narcos, forts de leur pouvoir économique, entendent jouer un rôle politique. Elle débouche en Colombie sur une véritable guerre. Depuis le quasi- démantèlement des cartels de Medellin (fin 1993) et de Cali (1995), les trafiquants non organisés en cartel se sont multipliés, mettant en place des structures beaucoup plus souples, indépendantes et compartimentées.

 

 

En Bolivie, le chef du "Cartel de La Paz", Luís Amado Pacheco Abraham, un homme d'affaires ayant pignon sur rue, ainsi que ses complices, avaient leurs entrées au Parlement. Plusieurs fois arrêté, il a  chaque fois "acheter sa libération". Sa présence dans les allées du pouvoir explique sans doute qu'il ait pu opérer très longtemps en toute impunité. L'opinion publique et certains experts estiment que les véritables commanditaires boliviens, n'ont pas été touchés. Les grands scandales dans lesquels des hommes politiques des différents partis ont été impliqués n'ont jamais été complètement éclaircis.

 

 

 

Mineurs recyclés:

 

Il ne reste rien des milliers de mineurs de Siglo XX et de Catavi, qui régulièrement, faisaient trembler le pouvoir. Les autorités n'ont plus rien à craindre des 60 000 mineurs éparpillés aux quatre coins du pays, divisés entre le secteur privé et le secteur étatique réduit comme peau de chagrin.

 

Aujourd'hui, certains exploitent une concession avec d'autres chômeurs. Ce nouveau système, qui n'a de coopératif que le nom, mobilise 30 000 mineurs à travers tout le pays. Finis les 3 X 8... Aujourd'hui, c'est chacun pour soi jusqu'à épuisement. c'est l'absence totale de sécurité, Chacun creuse dans son coin causant chaque année des milliers d'accidents. El Tio, cette divinité inca, véritable ange gardien des mineurs depuis l'arrivée des Espagnols, les a totalement abandonnés. Pour eux, la seule façon de résister, et surtout de surmonter leur peur, c'est de mâcher à longueur de journée la feuille amère de coca.

 

 

La mort dans l'âme, la plupart ont quitté Siglo XX pour aller tenter leur chance dans la forêt du Chaparé. Là-bas, ils ont rejoint les légions de laissés-pour-compte qui se sont lancés dans la production de coca. Que pouvaient-ils faire d'autre si ce n'est émigrer en Argentine, comme l'ont déjà fait 2 millions de Boliviens. Ils ont quitté les Andes pour l'Amazonie où, de Cochabamba à Santa-Cruz, ils continuent à manier le bâton de dynamite pour se faire entendre des autorités. Militaires et policiers demeurent l'ennemi numéro un. Hier, ils intervenaient sur le carreau de la mine pour obliger les grévistes ­ soupçonnés de "faire le lit de la subversion" ­ à reprendre le travail. Aujourd'hui, ils sillonnent les régions sauvages du Chaparé et du Beni pour traquer ces mêmes mineurs, accusés de faire alliance avec la mafia de la coca. Ils ne sont ni trafiquants ni producteurs de cocaïne. La coca leur permet à peine de vivre. Et nul ne leur propose une culture rentable de substitution. Entre-temps, les marchands et leurs complices continuent d'amasser des fortunes...

 

 

Chaleur, pluies excessives, peur de ce milieu inconnu, dur travail du déboisage, diarrhée chronique et nostalgie des hauteurs les menacent. Mais ils survivent. Un ou deux hectares par famille, un tiers pour l'autosubsistance, deux tiers pour la coca. Pas d'autre choix. Ils sont pauvres, il y a des acheteurs, et les narcos ont monté de solides réseaux. Après quelques années, les toits de tôle se font plus fréquents, les plus chanceux achètent un camion. Pourtant, la coca ne les a pas rendus riches. Aujourd'hui, elle fait d'eux des proscrits.

 

 

Les cultivateurs de coca ont très peu de revenus. De leur point de vue, accepter l'éradication c'est s'auto-condamnée à la pauvreté. On constate néanmoins un certain affaiblissement des producteurs de coca, une certaine fatigue, des frustrations, des désillusions. Dans les régions rurales, où vivent la majorité des cultivateurs de coca, on trouve très peu de routes, peu d'électricité, peu d'écoles, peu d'hôpitaux. La population est pauvre. On y cultive de la coca, mais également des produits servant à l'auto-subsistance : des fruits tropicaux, des plantes tropicales, des piments, des ananas, des bananes. Heureusement, les familles de cultivateurs se serrent les coudes. Le système millénaire de l' « ayni »  est remis en vigueur lors de la récolte elle se fait en communauté, sur les terres de chacun successivement. Cette solidarité est une des principales forces des «cocaleros» boliviens.

 

 

 

 

Dette et coca :

 

De nombreux pays en développement sont confrontés à un endettement croissant vis-à-vis d'autres Etats ou d'organismes internationaux, Banque Mondiale et Fonds Monétaire International (FMI). Les investissements effectués avec les emprunts, et les exportations de matières premières, étaient censés apporter des ressources suffisantes pour les remboursements. Mais l'échec des politiques économiques et la chute des cours des matières premières ont, au contraire, accru l'endettement.

 

 

Les pays sont contraints d'accepter les Programmes d'Ajustement Structurel (PAS) préconisés par le FMI.C'est  une politique économique d'inspiration libérale qui réduit au minimum les prérogatives de l'Etat afin de diminuer les dépenses et faire jouer les mécanismes de marché. Les modifications économiques préconisées par les PAS supposent également la libéralisation du secteur financier. L'absence de contrôle sur les flux financiers permet aux trafiquants internationaux de déplacer des sommes importantes en toute impunité. Les nombreuses succursales de banques de toutes nationalités s'occupent de blanchir l'argent, qui servira notamment à rembourser les dettes auprès de ces même banques.

 

 

Quel que soit le résultat économique, le coût social est considérable: dégénérescence des infrastructures (routes, ponts), disparition des systèmes de santé, renforcement des inégalités, la société n'a plus les moyens de s'occuper des plus démunis.

 

 

Que faire, dans ces conditions, quand on est un petit paysan en Bolivie? Tous les paysans des environs vendant les mêmes produits, les prix restent trop faibles ; l'absence de routes carrossables, d'infrastructures pour aller jusqu'au marché, augmentent les coûts de production ; en même temps, les dépenses de santé ou d'enseignement augmentent, ne serait-ce qu'en raison de l'éloignement (disparition d'écoles, de centres de santé et de transports en commun). La production de coca apparaît alors comme la solution miracle. La culture de la coca est tout simplement une question de survie pour les paysans.

 

 

Il ne fait aucun doute que depuis une quinzaine d'années, l'argent de la drogue constitue un véritable ballon d'oxygène pour l'économie bolivienne. Ce pays est avec Haïti le plus pauvre d'Amérique latine et l'un des plus pauvres du monde. Selon des déclarations récentes 70 % de la population vit dans la pauvreté dont 36 % dans l'indigence. 94 % de la population rurale et 53 % de la population urbaine ne peut pas satisfaire à ses besoins les plus élémentaires. Si la politique d'ajustement a été mise en place depuis 1985 à l'instigation des organisations financières internationales, si elle a permis de rétablir les grands équilibres macro-économiques (réduction de l'inflation, équilibre du budget, paiement de la dette extérieure, etc.), non seulement n'a pas amélioré la situation de la population, mais elle a provoqué l'extension du chômage et de l'économie informelle. Une grande partie des mineurs d'étain, mis à pied en 1986 à la suite de la fermeture des grandes mines, n'a trouvé d'autre alternative que de descendre dans la plaine tropicale du Chapare pour cultiver le cocaïer. les syndicats de producteurs de feuilles de coca sont devenus les principaux défenseurs de l'emploi en Bolivie. Ils ont non seulement l'appui de centaines de milliers de leurs adhérents, mais également celui d'une grande partie des travailleurs du pays.

 

 

Tous les gouvernements "néolibéraux" depuis 1985 sont conscients qu'ils ne peuvent se passer de l'argent de la drogue : ils sont donc pris entre les pressions des Etats-Unis et celles du FMI dont les objectifs ne peuvent être atteints qu'en ayant recours à l'argent de la cocaïne. La boucle est bouclée : l'endettement crée un besoin de liquidité qui ne peut être trouver qu'avec la vente de drogues. Les pays du Nord mènent d'une main une guerre coûteuse et inefficace contre le trafic de drogue, et de l'autre incitent les pays producteurs à continuer. Et en toute connaissance de cause.

 

 

 

 

Sources :

 

Internet, avec les sites de : The Guardian, El País,  Agence France-Presse, Chroniques Nomades, Le Monde, Le Monde Diplomatique, les Journaux boliviens Los Tiempos, La Razon, La Prensa, El Diario, Domingo et Pulso Digital, Le Site du monde du travail, Office des publications officielles des CE, Atlas Mondial des drogues, Observatoire géopolitique des drogues, Presses Universitaires de France,  Andean information network,  narconews, Défis Sud, …et leur rédacteurs ; Francesca Relea, Nick Thorpe, Jean-Marc Desfilhes, Alain Labrousse Lemoine Maurice, Bader Carmen; Rodrigo Jean-Michel, Jean Ortiz,  Aude Rossignol, Fernando Garcia, lucas patriat, Brigitte Verdière, Mariano Aguirre, Laëtitia Moreau, Al Giordano,…

 

 
 
Pour finir un petit complement d            


06/03/2008
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