Si nous nous étions réunis dans un colloque pour parler de la démocratie en Amérique latine il y a seulement dix ou douze ans, nous aurions fait ce que nous avons fait auparavant pendant des décennies : dénoncer les méfaits de l'impérialisme américain dans ce continent, constater que nous sommes dans un rapport de forces défavorable, même s'il s'est amélioré depuis la chute des dictatures, et enfin recenser les motifs d'espoir.
Nous sommes aujourd'hui dans une situation radicalement différente : l'impérialisme n'a pas changé d'objectifs, mais il se trouve sur la défensive au niveau mondial. En tout cas, il ne peut plus appliquer les méthodes brutales et cyniques du passé dans une Amérique latine qui, dans le respect des règles démocratiques, a majoritairement opté pour de profonds changements sociaux, et rejeté les recettes néolibérales du Consensus de Washington.
Le terme « impérialisme », pour se référer à la politique étrangère des États-unis, n'appartient pas uniquement au lexique de la gauche radicale. Les théoriciens néoconservateurs américains l'ont maintes fois utilisé, en le complétant parfois par un adjectif comme « libéral » ou « bienveillant ». En fait, il correspond à une ligne constante de l'Establishment des États-unis, que le président soit démocrate ou républicain. Cette ligne a été consignée dans deux documents gouvernementaux.
Le premier, qui tire les leçons de l'effondrement de l'URSS, et qui consacre l'avènement d'un monde unipolaire, a été publié par le Pentagone en 1992. Rédigé par Paul Wolfowitz et Lewis Libby, tous deux alors proches de l'actuel vice-président Dick Cheney, il est intitulé Defense Policy Guidance 1992-1994. Il préconise « d'empêcher toute puissance hostile de dominer les régions dont les ressources lui permettraient d'accéder au statut de grande puissance », de « décourager les pays industrialisés avancés de toute tentative visant à défier notre leadership ou renverser l'ordre politique économique établi » et de « prévenir l'émergence future de tout concurrent global ». Le second est la Stratégie nationale de la Maison Blanche de 2002. Il renforce le précédent en formulant la doctrine des « actions préventives » armées, de la légitimité du renversement de régimes jugés menaçants et de l'affirmation de la nécessaire suprématie des États-unis.
Tels sont les objectifs permanents de la politique étrangère américaine. Ils ont une très longue histoire en Amérique latine, depuis la formulation de la politique de Monroe en 1823. Il n'est pas un État de l'Hémisphère qui n'en ait fait l'expérience dans le sang, de la première intervention des marines à Porto Rico, en 1824, à l'appui logistique apporté à l'armée colombienne pour sa récente violation du territoire équatorien, en passant par le coup d'État du 11 avril 2001 contre le président Hugo Chavez. Si cette doctrine est permanente, le monde, lui, change, et les évolutions se sont accélérées au cours des dernières années dans l'ensemble du monde, et tout particulièrement en Amérique latine. Washington a vu se détériorer une bonne partie des instruments de son ambition impériale.
Des piliers ébranlés
Toute politique de puissance repose traditionnellement sur trois piliers : la capacité militaro-stratégique ; le poids économique et financier ; l'influence culturelle.
Le « faucon » américain Robert Kagan, lui, fait seulement la distinction entre deux formes de pouvoir :
le hard power, le pouvoir « dur », c'est-à-dire la force planétaire de projection et de frappe militaires, qui justifie la loi du plus fort. Cette notion inspire les deux documents officiels déjà cités ;
et le soft power, le pouvoir « mou », qui inclut la puissance culturelle, mais englobe également la capacité d'influence indirecte : accords commerciaux et financiers bilatéraux ou dans le cadre des organisations internationales (OMC, FMI, Banque mondiale) ; capacité de médiation et de négociation ; coopération scientifique et technique ; aide humanitaire, etc.
Kagan professe le plus grand mépris pour le soft power qui, selon lui, servirait de justification à l'impuissance des faibles, de l'Europe en particulier. Pourtant, comme l'a rappelé un autre auteur américain, Joseph Nye, ancien sous-secrétaire à la défense, ce soft power est peut-être le plus important : il sert en effet à légitimer les politiques américaines au niveau mondial et à désarmer idéologiquement les adversaires. Ce soft power se manifeste depuis toujours dans la force d'attraction du « modèle » américain via les industries de la culture et du divertissement, la propagation de la langue anglaise, etc. Il s'appuie également, et de manière décisive, sur le système médiatique qui continue à servir de vecteur à l'acceptation du néolibéralisme, et en particulier du libre-échange. Globalement, il s'agit de la conquête et du formatage des esprits, de la bataille pour l'hégémonie au sens que lui donnait Gramsci, afin de créer les conditions de la servitude volontaire. Les plus grandes victoires sont en effet celles pour lesquelles il n'y a même pas à livrer le combat, l'adversaire se considérant vaincu par avance.
Ce qui caractérise la période actuelle, c'est la dégradation de ces instruments de l'hégémonie des États-unis. La puissance militaire a déjà montré ses limites en Irak et en Afghanistan. Les forces armées américaines peuvent certainement rayer de la carte un pays tout entier, mais elles sont incapables d'assurer la sécurité d'un quartier de Bagdad ou de Kaboul. C'est pourquoi l'invasion d'un nouveau pays, à la manière des interventions à Saint-Domingue, à la Grenade ou à Panama, est aujourd'hui hautement improbable, ne serait-ce que par le manque de troupes disponibles.
La puissance économique et financière américaine, même si elle reste considérable, est durablement affaiblie, comme l'attestent la remise en cause du dollar comme monnaie de réserve internationale, la débâcle des subprimes, l'incapacité à aboutir à un accord à l'OMC, etc. La mondialisation libérale avait été impulsée au début des années 1980 pour servir prioritairement les intérêts des États-unis et de leurs multinationales. Aujourd'hui, en particulier depuis les crises financières de 1997-1998, ils n'en maîtrisent plus la dynamique. L'apparition de nouveaux acteurs, comme on va le voir plus loin, fait de cet État un État de plus en plus semblable aux autres. En outre, au plan interne, le pays se ruine dans la guerre en Irak, comme la Guerre des étoiles avait ruiné l'URSS. Le Prix Nobel Joseph Stiglitz a estimé la facture du fiasco criminel irakien à 3 000 milliards de dollars. Dans le même temps, la pauvreté et les inégalités augmentent, les infrastructures publiques se délabrent. Plusieurs centaines de ponts peuvent à tout moment d'écrouler.
En termes de soft power, le bilan est également négatif. Même si, partout dans le monde, les jeunes portent de casquettes et des T-shirts du NYPD ou d'une université américaine, même s'ils chantent du rap en anglais, ils sont de plus en plus hostiles à la politique américaine. La cote de popularité de George Bush est parfois voisine de zéro, et les autres gouvernements doivent en tenir compte. Les États-unis sont plus isolés que jamais aux Nations unies. Lors du récent Sommet de l'OTAN à Bucarest, ils n'ont même pas pu faire admettre l'Ukraine et la Georgie dans l'Organisation, en raison de l'opposition de l'Allemagne et de Nicolas Sarkozy qui est pourtant le président le plus pro-américain que la France ait connu.
Le retour des États
Le monde de 2008 est très différent de celui du début du second mandat de George Bush. D'un côté, la question de l'épuisement des ressources naturelles et du changement climatique est devenue un élément structurant de la politique mondiale, parce que les opinions publiques s'en sont emparées. Cette préoccupation existait évidemment avant, mais elle restait confinée dans les cercles scientifiques, écologistes et gouvernementaux. Elle met en grande difficulté les États-unis, en particulier auprès des gouvernements européens. La position selon laquelle l' American Way of Life n'est pas négociable ne pourra pas être tenue indéfiniment. Les ressources pétrolières sont maintenant à 85 % entre les mains d'acteurs étatiques. ExxonMobil est beaucoup moins puissante que Gazprom et Saudi Aramco.
Par ailleurs, les énormes réserves de devises accumulées par certains pays ont permis la constitution de fonds souverains qui interviennent directement dans le capital des plus grandes entreprises américaines et européennes. Elles le font jusqu'ici assez discrètement en mettant uniquement en avant des considérations de rentabilité. Mais personne ne peut croire sérieusement que les 200 milliards de dollars de la China Investment corporation, s'ajoutant aux centaines de milliards de dollars de bons du Trésor américains que détient la Chine, n'ont pas également des objectifs stratégiques.
Nous assistons, comme l'exprime Jacques Sapir dans Le Nouveau XXIe siècle, au grand retour des États. Le monde est devenu réellement multipolaire et la tendance ne pourra que s'amplifier. Les États-unis assistent impuissants à la fin de leur hégémonie et les objectifs formulés dans les documents stratégiques de 1992 et 2002 apparaissent complètement hors de portée. Cela s'applique en particulier à l'Amérique latine.
De Chavez à Lugo
Pendant plus d'une décennie, l'attention politique de Washington s'est principalement concentrée sur le Proche-Orient et sur l'Asie. Pendant ce temps, en Amérique latine, en réaction aux ravages des politiques néolibérales, des élections démocratiques ont porté au pouvoir, dans la majorité des pays, des dirigeants qui, à des degrés divers, compte tenu des rapports de forces nationaux, accordent la priorité à la résolution des problèmes sociaux de leurs concitoyens. De la première élection de Hugo Chavez au Venezuela en 1998 à celle de Fernando Lugo au Paraguay en 2008, cette décennie aura marqué une rupture complète avec le passé.
Plus significatif encore, la plupart des dirigeants ont opté pour des stratégies d'unité continentale. Il est bien fini le temps où les présidents nouvellement élus allaient se faire adouber à Washington avant de rencontrer leurs collègues de l'Hémisphère. Beaucoup de commentateurs ont glosé sur l'opposition entre deux gauches de gouvernement en Amérique latine, l'une « radicale », l'autre « modérée ». Ils n'ont pas compris que l'unité profitait aux uns et aux autres, et qu'ils la faisaient passer avant leurs divergences. Les États-unis n'ont pas pu empêcher la réintégration de Cuba dans la grande famille latino-américaine. Ils n'ont pu imposer leur candidat au secrétariat général de l'OEA. Ils ont été incapables d'éviter l'enterrement de l'ALCA à Mar del Plata en novembre 2005. Ils n'ont rien pu faire contre les politiques de récupération de leurs ressources naturelles par la Bolivie et le Venezuela.
De nombreuses initiatives d'intégration continentales ont été prises. Chacune d'elles n'implique pas nécessairement chaque pays, mais, réunies, elles constituent un maillage de plus en plus serré. Certaines concernent aussi des pays d'Amérique centrale et des Caraïbes : Petro-Caribe, l'ALBA, la Banque de l' ALBA, Telesur. En Amérique du Sud, il faut saluer la mise en place de la Banque du Sud ( Bancosur) et, surtout, le 23 mai dernier, la création à Brasilia de l' Union des nations d'Amérique du Sud (UNASUR), dotée d'un Conseil sud-américain de défense. Cette création est un événement de portée historique : pour la première fois, toute l'Amérique du Sud s'organise sans la présence des États-unis, et leur demande poliment de ne pas se mêler de ses affaires. Complètement isolé, le gouvernement colombien - relais, comme celui d'Alan Garcia au Pérou, des volontés de Washington -, a été contraint de s'y rallier, même s'il se refuse pour l'instant à intégrer le Conseil de défense.
Au plan des institutions multilatérales, l'Amérique latine rembourse la quasi totalité de ses dettes au FMI et aggrave ainsi la crise de cette organisation dont les frais de fonctionnement sont couverts par les intérêts des crédits qu'elle accorde. A l'OMC, le Brésil est le chef de file continental de la résistance aux exigences de l'Europe et des États-unis pour la conclusion du cycle de Doha, et il leur donne même des leçons de libéralisme en matière agricole. Si l'on considère que le clivage essentiel se situe entre l'acceptation ou le refus du libre-échange, il faut bien reconnaître que certaines oppositions Nord-Sud sont parfois très ambiguës. Mais, au plan géopolitique, ce qui compte c'est que les grands pays du Sud, comme le Brésil, résistent avec succès aux injonctions du Nord, et plus particulièrement à celles des États-unis. Cette accumulation de revers oblige les États-unis à revoir sérieusement leur stratégie latino-américaine.
L'Empire ne va pas baisser pas les bras
Il ne faut pas se faire d'illusions. Les États-unis ne sont pas disposés à baisser les bras face à des politiques qui remettent en question les intérêts de leurs multinationales et, plus généralement, leur emprise séculaire sur Amérique latine. Ce qui les perturbe sans doute le plus, c'est le « mauvais exemple » que donnent au reste du monde certains gouvernements progressistes en se réappropriant leurs ressources naturelles ; en affirmant leur autonomie politique ; en mettant en place, avec l'ALBA, un modèle de coopération économique et commerciale en rupture avec le libre-échange et donc avec l'OMC ; en se passant des institutions de Bretton Woods (FMI et Banque mondiale) qui sont autant de succursales du département du Trésor. Ce sont les dogmes de la globalisation néolibérale qui se trouvent ainsi rejetés, et ce n'est pas rien.
A première vue, la méthode du « gros bâton » paraît révolue. Il n'en reste pas moins que, ces dernières années, des discours sur la légitimité de l'assassinat du président Chavez ont pu être entendus sur des chaînes de télévision américaines. Les autorités de Washington ont évidemment proclamé que ce n'était pas leur politique, mais elles le disaient aussi à propos de Cuba tout en organisant plusieurs centaines de tentatives d'assassinat de Fidel Castro. L'élimination physique, « à l'israélienne », en territoire équatorien, du commandant des FARC Raul Reyes par le gouvernement colombien avec le soutien technologique des conseillers militaires américains montre bien que l'option du « magnicide » n'est pas définitivement écartée. C'est pourquoi la question de la sécurité personnelle des dirigeants latino-américains les plus engagés dans la résistance à l'Empire ne doit pas être traitée à la légère.
Washington dispose cependant de beaucoup d'autres moyens pour ralentir ou saboter les tentatives d'autonomisation du sous-continent :
la déstabilisation des gouvernements progressistes par la création et le financement de mouvements d'opposition sur le modèle des « révolutions oranges » ;
l'exacerbation des conflits internes (comme en Bolivie) ou entre États (la Colombie contre l'Équateur et le Venezuela). De ce point de vue, le président colombien Uribe est un véritable danger public régional. Il est significatif qu'il ait refusé de s'associer au Conseil de défense de l'UNASUR et qu'il veuille accueillir sur son territoire une base militaire américaine qui remplacerait celle de Manta, située en territoire équatorien, et dont le président Rafael Correa a demandé l'évacuation à l'expiration de son bail ;
le harcèlement financier, comme celui que la multinationale ExxonMobil a tenté, mais en vain, de mener contre la société nationale vénézuélienne PDVSA ;
l'intimidation militaire par la réactivation de la Quatrième Flotte de l'US Navy qui croisera au large des côtes caraïbes et de l'Atlantique Sud ;
la signature de traités bilatéraux léonins de libre-échange ;
les campagnes massives de désinformation par un système médiatique entièrement soumis aux intérêts américains. En Amérique latine, la quasi totalité des médias privés sont hostiles aux gouvernements progressistes. Le formatage des esprits des journalistes est très avancé, au point qu'ils répètent tous la même chose. Récemment, Ignacio Ramonet et moi étions interrogés par des journalistes brésiliens à Belem. Le sujet était la démocratie en Amérique latine. Par un réflexe pavlovien, la question qui fusa aussitôt fut : « Et Chavez ? » Aucun de nos interlocuteurs ne nous posa spontanément de questions sur les dizaines d'assassinats de syndicalistes et les 10 000 à 30 000 (il n'existe pas de sources absolument fiables) de « disparitions » en Colombie. Ces campagnes de désinformation et de calomnies trouvent malheureusement de puissants relais en Europe, et tout particulièrement en France, tous médias confondus, mais le ton étant donné par Le Monde et Libération. Leur objectif principal est d'empêcher la contagion des processus de transformation sociale en cours en Amérique latine et de neutraliser les mouvements de solidarité avec eux. Nul doute qu'elles vont s'intensifier dans la perspective des prochaines élections au Brésil, en Bolivie et au Venezuela.
Les voies de la résistance
Dans son aspiration majoritaire à l'autonomie, l'Amérique latine dispose d'un outil majeur : la « force tranquille » de sa volonté de maintenir son unité dans la diversité. C'est là le sens de la création d'UNASUR, même si, comme on l'a vu, cette nouvelle organisation ne regroupe pour l'instant que les nations d'Amérique du Sud.
L'Amérique latine a intérêt à multiplier les formes de coopération entre États dans tous les domaines, par des structures à géométrie variable, de manière à tisser des solidarités de fait entre elles. La dimension culturelle de cette solidarité est capitale et, à cet égard, le sous-continent a des atouts supérieurs à ceux de l'Europe : deux langues véhiculaires massivement majoritaires et très proches, l'espagnol et le portugais, dans la mesure où l'anglais, le français et le néerlandais ne concernent que des petits pays : la Guyana, HaÏti et le Surinam. Dans l'Union européenne, qui regroupe 27 États, on ne compte pas moins de 23 langues officielles. Je n'aborde pas ici la question des dizaines de langues dites, en Europe, « régionales et minoritaires », de même que l'Amérique latine compte, elle aussi, de nombreuses langues indigènes qui font partie de son patrimoine.
Pour faire face au travail de sape idéologique en faveur du néolibéralisme, des fondations américaines ou européennes (comme la FAES de MM. Aznar et Fox) hyper-actives sur le continent, l'Amérique latine devrait se doter, elle aussi, de fondations continentales. A la veille des célébrations du Deuxième centenaire des Indépendances, elles constitueraient une deuxième Déclaration d'indépendance intellectuelle, culturelle, politique et stratégique. La dimension médiatique est évidemment cruciale. Il faut souhaiter un grand développement de Telesur et, dans chaque pays, la création de médias indépendants des oligarchies et des puissances financières liées à l'Empire.
L'Amérique latine, si elle est unie, a les moyens de refuser les clauses exorbitantes des accords de libre-échange, que ce soient ceux entre l'Union européenne et l'Amérique centrale, la Communauté andine des nations et le Mercosur, ou bien les traités bilatéraux avec les États-unis. Le libre-échange est l'ennemi numéro 1 des politiques de lutte contre la pauvreté et les inégalités, et également des politiques de préservation de l'environnement. A cet égard, la défense de l'Amazonie peut être un thème fédérateur. Les États du bassin amazonien, et en premier lieu le Brésil, ont besoin de la solidarité internationale, dans le respect de leur souveraineté, pour gérer, dans leur intérêt et dans celui du reste du monde, le formidable patrimoine dont la nature les a dotés. Ceci vaut également pour les ressources en eau, en minerais et en énergies non renouvelables. Avant d'être planétaire, la solidarité doit être latino-américaine.
Il faut signaler un élément supplémentaire d'optimisme : ce qui se passe en Amérique latine est un motif d'espoir et d'étude pour les forces progressistes d'Europe et d'autres régions du monde. La première leçon à en tirer est que la politique, et non pas la finance, peut être placée au poste de commandement, et que l'on peut résister à la mondialisation néolibérale si on s'appuie sur les mouvements populaires. Une articulation inédite entre ces mouvements, les partis et les gouvernements engagés dans des processus de transformation sociale est en train de se mettre en place dans plusieurs pays. En Europe, Utopie critique et l'association Mémoire des luttes ont donné à cette articulation inédite le nom de post-altermondialisme, qui prolonge l'altermondialisme des Forums sociaux mondiaux. Le prochain de ces Forums, prévu à Belem en janvier 2009, fournira l'occasion d'approfondir la réflexion sur cette nouvelle configuration.
(Ce texte reprend les éléments d'une intervention au colloque « L'avenir de la démocratie en Amérique latine » tenu à Belem (Brésil) les 29 et 30 mai 2008. Cette rencontre avait été co-organisée par le gouvernement de l'État du Para, l'Université fédérale du Para et l'association française Mémoire des luttes.)