On veut faire “avaler” de force la pilule du lendemain au Pérou
Le
ministre de la santé du Pérou, Oscar Ugarte, a décidé le 8 mars – journée
internationale de la femme – de signer la résolution ministérielle par laquelle
la pilule du lendemain est réintégrée dans le programme national de planning
familial, en prenant acte de « l'opinion actualisée de l'Organisation
panaméricaine de la santé et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) qui a
déclarée que cette méthode n'est pas abortive ».
Le ministre, ce faisant, a soulevé une tempête. Car le Tribunal constitutionnel
péruvien, la plus haute juridiction du pays, a interdit l'an dernier au
gouvernement de distribuer la « contraception d'urgence », qdans la mesure où «
on ne peut vérifier si ce médicament n'a pas un caractère abortif ». Les juges
ont estimé n'avoir trouvé aucun élément permettant d'affirmer qu'elle ne l'a
pas. Dans un premier temps, ils ont interdit la distribution gratuite que le
gouvernement envisageait ; celui-ci était revenu à la charge en proposant de
vendre la pilule du lendemain à faible prix pour contourner l'interdit. Le
tribunal a fait savoir que le mode de distribution, gratuit ou non,
n'avait rien à voir avec le caractère potentiellement abortif de la
pilule. Et a tenu bon.
Quelques mois se sont donc passés avant que le ministre de la santé ne décide
de son propre mouvement, il y a quelques jours, que toute la lumière était
faite sur la question.
Réaction de l'archevêque de Piura, président de la commission de la famille des
évêques du Pérou : « Cette mise en scène de M. le ministre Oscar Ugarte serait
comique, n'étaient ses conséquences tragiques. Une personne ayant une
responsabilité politique comme celle du ministre sait parfaitement que son
annonce n'est qu'une manœuvre de propagande pour satisfaire le minuscule lobby
féministe – minuscule mais économiquement puissant. (…) Nous savons tous, et M.
le ministre, en tant que médecin, devrait le savoir aussi, que la vie humaine
et donc la grossesse, commencent à la fécondation, et non à l'implantation.
C'est une vérité médicale et non religieuse. Tant l'OPS que l'OMS ont été
dénoncés par des scientifiques de renom pour avoir cédé aux pressions
pro-avortement et soutenu que la vie commence à l'implantation. »
Il va de soi que le ministre Ugarte n'a pas apporté la moindre preuve de ses
allégations à propos de l'OMS... Mais cette question-là est secondaire.
Beaucoup de Péruviens sont scandalisés par le mépris affiché par le
gouvernement à l'égard du Tribunal constitutionnel. Le feuilleton est donc loin
d'être clos.
Fabiola Morales, élue du Congrès des députés, a
porté vendredi dernier une procédure d'« accusation constitutionnelle » contre
Oscar Ugarte au motif qu'il a passé outre une sentence du Tribunal
constitutionnel : au-delà même de la question de la pilule du lendemain,
explique l'élue, il s'agit d'un refus manifester de « respecter les
institutions » péruviennes, particulièrement ledit Tribunal qui est « une
institution typique de l'Etat de droit ». « Terminons-en avec le Tribunal
constitutionnel, mais ne permettons jamais qu'il continue d'exister en ne
jouant qu'un rôle décoratif », a-t-elle ironisé.
Le vice-président du Tribunal, Carlos Mesia, était déjà intervenu dans la presse jeudi en affirmant que le ministre
avait violé une sentence de cette cour et qu'en outre, son acte est illégal
parce que « l'ordonnancement constitutionnel du Pérou considère que la vie
humaine commence à la fécondation ».
L'opinion de l'OMS ? Elle est sans objet, précise Carlos Mesia à ACI Prensa,
dans la mesure où elle n'est pas un « organe technique, elle n'est pas
constituée d'embryologistes, c'est un organe politique des Nations Unies qui de
plus fait la promotion de l'avortement dans les différents pays ».
« Les résolutions de l'OMS ont un caractère de simple recommandation. Et ses
opinions n'ont pas valeur supra-nationale. L'OMS considère que la vie humaine
commence à la nidation, alors que l'ordonnancement constitutionnel considère que
la vie commence à la fécondation », a-t-il ajouté, précisant que le ministre
n'apporte aucun élément que le Tribunal n'ait déjà rejeté.
« C'est un coup d'Etat », a-t-il expliqué, rappelant que celui-ci ne se produit
pas seulement par la destitution d'un Président ou la mise à l'écart du Congrès
par le Président, mais chaque fois qu'un « organe usurpe ou méconnaît les
attributions d'un autre » : ici c'est le ministre de la Santé, qui fait partie
de l'exécutif, qui méconnaît la fonction juridictionnelle du Tribunal en même
temps qu'il méconnaît le pouvoir judiciaire. « Au Pérou, les sentences ne
servent ni ne valent en ce moment. »
© leblogdejeannesmits.
source : http://leblogdejeannesmits.blogspot.com/2010/03/on-veut-faire-avaler-de-force-la-pilule.html
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